Un Nouveau Candidat, Glacialement Audacieux

Dans un pays où la politique avait le goût de la soupe réchauffée et les discours la consistance de l’eau de vaisselle, un nouveau visage fit son apparition. Enfin, “visage” est un bien grand mot. Il s’agissait plutôt d’une silhouette imposante, d’un pelage blanc immaculé, et d’un charisme qui aurait pu faire fondre un glacier… si ce n’était pas son pire ennemi.
Il s’appelait Nocarbonito. Oui, Nocarbonito. Et c’était un ours polaire.
Son apparition a fait l’effet d’une déflagration. Pas sur les plateaux télé, bien sûr, car les fauteuils auraient eu du mal à le supporter. Mais sur les réseaux sociaux, dans les journaux, et surtout, dans le cœur des gens. Nocarbonito, cet ours polaire majestueux et étrangement éloquent (grâce à un traducteur vocal sophistiqué, on vous rassure), s’est lancé dans la course au poste de Premier ministre.
Et il était bien dans son slip. Pas un slip humain, évidemment. Mais dans son propre “slip” de fourrure immaculée, avec une assurance que même les plus grands orateurs politiques n’avaient jamais affichée. C’est lors d’une conférence de presse improvisée, où il avait accidentellement fait tomber un micro en plastique d’un revers de patte, que le journaliste du “Quotidien Glacial” avait chuchoté à son voisin : “Cet ours est tellement sûr de lui, il est vraiment bien dans son slip.”
La phrase, bien sûr, s’est répandue comme une traînée de poudre de neige.
Le Programme “Carbone Zéro Absolu”
Le programme de Nocarbonito, quant à lui, était aussi radical que sa stature. Il s’appelait “Le Bilan Carbone Zéro Absolu”. Pour lui, il ne s’agissait pas de réduire l’empreinte carbone, mais de la bannir, de l’éradiquer, de la geler à jamais. Sa motivation était simple, viscérale : la fonte des glaces menaçait sa maison, son existence même.
Il proposait une révolution glaciale :
- Réglementation Climatique Polaire : Chaque décision politique serait filtrée à travers un “Indice de Refroidissement Planétaire”.
- Energie Glaciale : Investissement massif dans les énergies renouvelables et un plan audacieux pour construire des “fermes à glace” géantes pour stabiliser les températures.
- Protection des Habitats : Création d’un “Dôme Polaire International” pour préserver les écosystèmes les plus menacés, y compris les siens.
- Transport Zéro Émission : Remplacement total des véhicules à combustion par des modes de transport électriques ou à hydrogène, avec un réseau de patinoires géantes pour les déplacements urbains (une idée qui a fait froncer les sourcils, même aux plus écologistes).
“La vraie politique”, disait-il avec un grognement profond traduit instantanément, “ce n’est pas de porter à droite ou à gauche. C’est de porter vers la survie. Et la direction, c’est celle d’un avenir froid et propre.”
Les experts s’étranglaient avec leurs carottes bio. Les autres politiciens le traitaient de doux rêveur, ou pire, de “mascotte de cirque”. Mais le peuple, lui, était fasciné. Il ne promettait pas la lune, mais un futur glacé et vivable sur Terre. Il ne faisait pas de grands gestes théâtraux, juste quelques coups de patte bien sentis sur le pupitre.
Sa campagne, une véritable odyssée à travers le pays (heureusement, son équipe avait trouvé une remorque réfrigérée surdimensionnée), a gagné en popularité. On ne parlait plus de ses concurrents, mais de lui. On ne débattait plus de leurs querelles, mais de son programme. Les gens se demandaient : est-ce que ce “type bien dans son slip… de fourrure” allait vraiment devenir notre prochain Premier ministre ?
Le suspense était glacé. Mais une chose était sûre : l’ours qui ne portait ni à droite ni à gauche, mais vers un avenir “Carbone Zéro Absolu”, avait réussi à faire de l’écologie le sujet central d’une élection. Et rien que ça, c’était déjà une victoire.